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Leica R4
(1980-1986) - R4, R4s et R4s2 (ou R4sP), le Leica R seconde génération
mercredi 1er février 2006, par
LE R4, UN BOÎTER SYSTÈME TOTALEMENT NOUVEAU
Deuxième boîtier reflex issu de la collaboration entre Minolta et Leitz, après le succès du Leica R3, le R4 est présenté en 1980.
Comme son prédécesseur, il est développé sur la base d’un châssis étudié en commun, et d’un obturateur déjà présent dans le Minolta XD-7 commercialisé depuis 1977.
Ce nouveau reflex ne partage aucun élément avec ses quatre prédécesseurs, les trois Leicaflex et le Leica R3.
Il s’inscrit dans la tendance de l’époque de la généralisation des reflex 24 x 36 compacts, et ses cotes sont similaires par exemple à celles des FM et FE de Nikon. Mais la nouveauté n’est pas seulement dans son petit format, à peine plus volumineux qu’un M, mais surtout dans le mode d’analyse de la lumière, totalement ré-étudié, et par la présence d’une électronique très complexe qui le dote de fonctions particulièrement avancées.
Un système avancé d’analyse de la lumière
Le principe d’analyse de la lumière suivant deux modes, mesure sélective sur un cercle central de 7 mm, ou mesure intégrale, déjà présent sur le R3, est reconduit, mais au moyen d’un mécanisme totalement nouveau : l’intégralité du miroir est semi-transparent, et un seul élément sensible au silicium est présent au fond de la chambre de visée. La lumière est réfléchie, non plus au moyen d’un petit miroir secondaire comme sur les SL, SL2 et R3, mais par un grand réflecteur de Fresnel dont la surface est identique à celle du miroir, et qui renvoie la lumière sur l’élément sensible avec une prépondérance sur la zone centrale. Le centre du réflecteur est légèrement décalé, pour que la cellule reçoive de manière plus importante la lumière correspondant au bas de l’image, et ainsi, en usage courant, l’analyse n’est pas déséquilibrée par la plus forte luminosité du ciel.
Le passage de l’analyse de la lumière en mode sélectif ou intégral se fait au moyen d’un mécanisme d’une grande simplicité : en mode sélectif, une lentille se positionne devant l’élément sensible afin que seuls les rayons lumineux correspondant à la zone centrale de 7 mm n’atteignent la cellule photo-sensible.
Un appareil en fonctionnement multimode
Le Leica R4 comporte cinq modes de fonctionnement, régis par un microprocesseur :
- le mode manuel, pour lequel l’analyse de la lumière se fait suivant la mesure sélective,
- un premier mode automatique avec priorité au diaphragme, en utilisant la mesure sélective,
- un deuxième mode automatique avec priorité au diaphragme, en utilisant la mesure intégrale,
- un mode programme, dans lequel l’appareil détermine automatiquement le temps de pose et l’ouverture du diaphragme, suivant les données pré-enregistrées par Leitz dans les micro-circuits,
- enfin un mode automatique avec priorité à la vitesse, en mesure intégrale.
En mode programme et en mode automatique à priorité vitesse, une couronne placée à l’intérieur de la baïonnette commande la présélection automatique du diaphragme, utilisant pour cela la troisième came introduite dans les optiques avec le Leica R3. Tous les objectifs du R3, et les séries antérieures modifiées par addition de cette troisième came, fonctionnent donc sur le R4, ainsi que les séries actuelles, les R8 et R9 fonctionnant de manière similaire.
Les modes automatiques, très efficaces, sont gérés par l’électronique qui marie des éléments déjà présents dans le Minolta XD-7, commandant l’affichage dans le viseur, et l’obturateur, et des éléments nouvellement développés par Leitz pour le R4, renfermant les éléments d’analyse de la lumière et de l’image, et la commande des programmes.
C’est là que se situe la faiblesse des premières séries du R4.
Des problèmes de fiabilité électronique sur la première génération
Probablement en raison de cette origine double, et certainement également parce que la micro-électronique embarquée en est encore à ses balbutiements à la fin des années 1970, ces circuits connaissent rapidement des pannes multiples qui obligent leitz à reprendre en service après-vente une quantité anormalement élevée de boîtiers.
Entre 1980 et 1982, les circuits électroniques feront l’objet de trois versions successives, allant vers une simplification toujours plus grande. A titre indicatif, on peut exprimer cette évolution par des chiffres illustrant bien les progrès et l’effort de rationalisation des ingénieurs : il y a dans la première version 138 points de soudures entre les circuits et les éléments externes, puis 100 dans la deuxième version, et enfin 38 dans la troisième version !
Il est généralement admis, mais non vérifié, que c’est à partir de la fin de l’année 1982, et du numéro de série 1600000, qu’est montée cette dernière version de l’électronique du R4.
Ergonomie et équipement
Le R4 est d’une prise en main très agréable. L’ensemble de l’habillage, capots, platine frontale, et commandes, a été redessiné intégralement par Leitz, et le boîtier, de conception saine et élégante, a été conservé avec des modifications mineures jusqu’au R7, successeur direct, et au R6.2, version mécanique encore disponible en 2002.
C’est une longévité remarquable.
Il conserve de ses origines communes avec le Minolta XD-7 la position du levier d’armement (celui-ci dans son dessin est très inspiré de celui du M4-P alors commercialisé), le déclencheur concentrique au barillet des vitesses, et le dos dégondable échangeable sans restriction avec celui du Minolta. Toutefois, dans sa version R4, ce dernier comporte une fenêtre permettant de visualiser la cartouche de film présente dans l’appareil.
Il est équipé d’un retardateur électronique, d’un mécanisme de compensation de l’exposition, de -2 à +2 EV par demi-valeurs, d’un mécanisme de fermeture de l’oculaire contre les lumières parasites pour la photographie sur pied en mode automatique ou programme, d’une prise de synchro-flash et d’une griffe porte-flash, recevant les adaptateurs du système SCA de Metz et les flash Minolta.
Il reçoit en option une belle gamme d’accessoire, comme un dos dateur, un winder permettant des cadences de 2 images par seconde, et un moteur pour des cadences de 4 images par seconde, pouvant être asservis par une commande à distance programmable, connectée par cable, jusqu’à 100 mètres de distance. Le moteur peut être utilisé avec une poignée additionnelle pour un meilleur maintien.
Tous les R4 sont motorisables, et l’appellation " R4 mot " des premiers modèles a été abandonnée au profit de la seule appellation R4.
Un dos de 250 vue a même été annoncé dans le programme Leitz de 1982, mais il semble qu’il n’a jamais été commercialisé.
Le viseur est complet, affichant toutes les informations nécessaires : par diodes le mode en cours, la présence ou non d’une correction d’exposition, les limites de couplage de la cellule lorsque celles-ci sont atteintes, une échelle des vitesses ou des diaphragmes qui se commute automatiquement suivant le mode sélectionné, ainsi que le recyclage en cours du flash. Par des mécanismes optiques et mécaniques, les ouvertures de diaphragme et les vitesses sélectionnées en mode manuel sont aussi présentes.
L’image de visée, avec cinq verres de visées interchangeables disponibles, marque un réel progrès par rapport au R3, mais, probablement en raison de la compacité, la luminosité est en retrait par rapport à celle des viseurs des boitiers professionnels concurrents.
Ce dernier point, et d’autres, font partie des reproches que la presse professionnelle a pu faire à l’époque de la présentation de ce boîtier par ailleurs très réussi.
Des lacunes pointées à la sortie de ce nouvel appareil
Avec le R4, Leitz a proposé un système très complet, marquant un grand progrès par rapport au R3. Mais des lacunes ont été critiquées lors de la sortie de l’appareil, le plaçant en retrait pour un usage professionnel, ou, plus simplement, par rapport à la concurrence présentant des possibilités toujours plus étendues :
- il n’y a pas de mesure TTL au flash,
- il n’y a pas de viseur interchangeable,
- le miroir n’est pas verrouillable en position haute, mais l’amortissement remarquable relativise cette critique,
- l’obturateur est limité au 1/1000e de seconde ; c’est d’autant plus étonnant que les tests montrent que le 1/2000e de seconde est atteint en mode automatique ; cette possibilité ne sera exploitée qu’à partir du R5 qui lui succèdera,
- enfin les échelles des vitesses et diaphragme disposées verticalement à gauche dans le viseur ne sont pas très lisibles en basse lumière, aucun dispositif d’illumination n’ayant été prévu, et ces échelles empiètent sur l’image de visée.
Le R4s de 1983
Des versions simplifiées : les Leica R4s
En 1983, Le Leica R4s est présenté. Il s’appuie sur l’électronique de la dernière version, mais elle est bridée : les modes programme, et automatisme avec priorité à la vitesse sont supprimés.
En raison de la plus grande simplicité de cette version, elle sera largement diffusée. On lui reproche alors la suppression de l’affichage de la vitesse sélectionnée dans le viseur en mode manuel. En effet, un photographe professionnel peut se contenter de cette version simplifiée, mais il n’est pas acceptable de ne pas avoir ce rappel lors de l’utilisation manuelle de l’appareil.
Le R4s2 de 1985
Une série limitée : le Leica R4s2
En fin de carrière commerciale du boîtier, une nouvelle version du R4s est proposée en petit nombre d’exemplaires. C’est un peu une série spéciale, qui préfigure les R5 et R-E à venir : produite à seulement 5000 exemplaires, elle restitue l’affichage des vitesses supprimé dans le viseur du R4s, et propose des commandes redessinées : les poussoirs de compensation de l’exposition, de test des piles, le levier d’armement, sont gainés de plastique et plus volumineux. La manivelle de rembobinage est rehaussée, et le mécanisme de verrouillage des modes est modifié, pour éviter de le déplacer accidentellement lors des manipulations.
Ce modèle se trouve aussi sous la dénomination R4sP, commercialisée surtout aux États-Unis, mais on en a commercialisé au moins en France également.
En conclusion
Avec des défauts de jeunesse, le R4, et ses versions successives, s’est finalement imposé comme un excellent boîtier, et son succès commercial a été sans précédent pour un reflex Leitz : toutes versions confondues, 105000 exemplaires ont été vendus entre 1980 et 1986.
Il a permis d’asseoir un système qui sera reconduit à travers les R5, R-E et R7, héritiers directs jusqu’en 1998, date de présentation du R8 qui marque une rupture technologique et stylistique, et à travers les R6 et R6.2, variations mécaniques, de 1988 à 2002.
le R4s2 de 1985, vu de dessus (notez la mention MOD 2 sur la griffe porte-accessoires)
Utiliser les Leica R4 aujourd’hui ?
Lorsqu’on en trouve un en bon état, le R4 peut être utilisé sans restriction aujourd’hui : c’est un boitier moderne et performant.
Il semble qu’il est préférable d’éviter les séries antérieures aux numéros de série 1600000 (la production commence avec le R4 mot n° 1533351), et généralement tous ceux qui sont gravés R4 mot en face avant, pour bénéficier de la dernière génération de l’électronique, mais celle-ci a pu être remplacée par le Service Après-Vente de leitz. Il faudra simplement prendre la précaution d’en demander la preuve (facture de l’atelier ou attestation du SAV de Leitz).
En raison de leur plus grande rusticité, gage de moins de pannes potentielles, les R4s2 sont généralement préférés, et sont mieux côtés sur le marché de l’occasion.
Comme pour le Leica R3, il faut savoir que Leica n’assure plus la réparation des circuits électroniques.
Tous les moteurs et winder de la série R4 à R6 sont utilisables sur le R4. Mais les moteurs et winder marqués " R4 " sont généralement incompatibles avec les boitiers ultérieurs.
Variantes et séries spéciales
Pendant la production du R4, Leitz a modifié son logo rouge. Les premiers modèles comportent en face avant un large disque rouge en aluchromie, remplacé ensuite par une pastille rouge peinte et en relief, plus petite. Ce dernier logo, renommé "Leica" au lieu de "Leitz" en 1988, est celui qui est toujours disposé sur les boitiers aujourd’hui.
Des séries spéciales du R4 ont été produites, en particulier une version plaquée d’or fin, vendue avec un Summilux de 50mm, lui aussi plaqué.
Caractéristiques techniques
- Châssis en aluminium moulé sous pression.
Capot supérieur en zinc moulé sous pression, chromé ou anodisé noir.
Semelle en laiton, chromée ou anodisée noir.
Poids : 630 g
L x H x ép. : 138,5 mm x 88,1 mm x 60 mm. - Mise en route du posemètre : par légère pression sur le déclencheur
- Méthode de mesure : sélective mémorisable sur un cercle central de 7 mm, ou intégrale, mode affiché dans le viseur
- Gamme de couplage : à 100 ISO, EV 3 à 19 en mesure sélective, EV 1 à 19 en mesure intégrale.
- Modes fonctionnels :
- manuel
- automatique avec priorité à l’ouverture, mesure sélective
- automatique avec priorité à l’ouverture, mesure intégrale
- programme (sauf sur les R4s et R4s2)
- automatique avec priorité au diaphragme, mesure intégrale (sauf sur les R4s et R4s2)
- Correction d’exposition : + ou - 2 EV
- Course pour l’armement : 130°.
- Obturateur : à commande électronique, à lamelles métalliques à défilement vertical.
Pose B, temps de pose de 8 s à 1/1000e s en mode automatique, et toutes vitesses intermédiaires, de 1 s à 1/1000e s en mode manuel
Réglages intermédiaires impossibles en mode manuel
Vitesses mécaniques sans pile : pose B et 1/100e s. - Levier de profondeur de champ, et retardateur électronique.
- Verres de visée : cinq verres interchangeables.
- Flash : contacts flash en façade, et contact pour sabot de flash normalisé (dédié spécialement au système Metz et aux flash Minolta.
Synchronisation à 1/100 de seconde. - Alimentation : deux piles 1,5 volts type SR44, dans la semelle
- Moteurs : tous les R4 sont motorisables, winder 2 images/seconde , moteur 4 images seconde, poignée de maintien.
Autres sources : Revue Phot’Argus de juin 1980 sur le R4 mot, et du 2ème trimestre 1983 sur le R4s. Article avant présentation à la Photokina, Photo-Magazine, septembre 1980.
Les photographies illustrant cet article sont de Coignet (R4), Bernard (R4s) et Lison (R4s2).
Voir en ligne : Chercher des images faites au R4